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ROMAN-FEUILLETON


LE CYCLE DES MINDJULA

Episode 1

 LA CUREE DES MINDJULA

 Daniel MATOKOT

 

C’est l’énième fois que je raconte cette histoire.

 

Personne ne me croit, moi, Ununu, descendant de Kimbembe, du clan de ceux de Kawunga. Beaucoup me traitent de blagueur, d’illuminé.

 

D’autres déclarent que je serai un conteur illustre.

 

On qualifie mon récit de conte à dormir debout, digne des « Mille et une nuits ».

 

Oh, incrédules !

 

Vous vous gaussez de moi !

 

Moi qui faillis avoir des cheveux blancs, des sourcils blancs, des favoris blancs, des moustaches blanches avant l’âge mûr !

Et pourtant…

 

Pourtant, les Mindjula existent !

 

Tous les villageois du pays, de l’amont du Grand Fleuve jusqu’aux contreforts des Monts Miongo, du village de Pandzouki au-delà de la Cité Eternelle de NKobo, de la vallée des Dix Rivières aux boucles du  fleuve Ntô-Nkama, le savent.

 

Des histoires invraisemblables circulent, le soir, au  « mbongui », au milieu des ululements des hiboux et des cris stridents des roussettes.

 

Certains les ont rencontrés la nuit, au clair de la lune, de blanc vêtus, longue procession sinistre se dirigeant vers quelque tombeau éloigné et isolé pour y accomplir leurs actes sataniques.

 

Des innocents ont disparu précocement, victimes des pratiques fétichistes et cannibalistiques de cette confrérie.

 

Cela, tous les villageois, de l’amont du Grand Fleuve jusqu’aux contreforts des Monts Miongo, du village de Pandzouki au-delà de la Cité Eternelle de NKobo, de la vallée des Dix Rivières aux boucles du fleuve Ntô-Nkama, le savent.  

 

Pourquoi alors ne me croît–on pas, moi, Ununu,  descendant de Kimbembu, du clan de ceux de Kawunga ?

 

Pourquoi ?

 

Roulements de tonnerre, éclairs, cris de rage et de désespoir, fuite éperdue dans l’épaisseur de l’ombre  sont imprimés dans les méandres de mon cortex cérébral. Gravure que ni l’âge, ni le temps ne pourront effacer.

 

Dix… douze… ou treize… grandes saisons de pluies sont passées… Pourtant j’ai l’impression que… un…   deux… ou trois… jours seulement me séparent de ce cauchemar.

 

Personne ne me croît…

 

Pourquoi ?

 

Les éclairs qui illuminent la courbe du ciel…

 

La force qui soulève et projette à dix pieds…

 

Les étoiles qui carillonnent dans la tête…

 

La meute hurlante d'assoiffés de sang chaud…

 

Avant que je ne m’échappe des  limbes de la nuit, que je ne m’ébroue au sortir du sommeil, que je ne reprenne l’usage entier de mes sens, dans mon esprit défile la suite d’événements m’ayant plongé dans les abysses du drame.

 

Les nuits sont longues et enfiévrées.

 

Le corps s’agrippe aux pierres du passé. Il retrouve les bouts incandescents du fil d'Arianne, attaché à la rambarde de la conscience. Il s’engouffre dans la meurtrière du subconscient pour y récolter les briques d’un événement enterré.  Il se recroqueville pour raconter…

 

La Curée des mindjula !

  

A suivre…

 

Copyright @ 2006 Centre d'études stratégiques du bassin du Congo   -   Tous droits réservés

Conception : Aimé D. Mianzenza

Réalisation : Daniel Matokot, Sidonie Matokot-Mianzenza, Aimé D. Mianzenza, Graziella Mianzenza