Centre d'études stratégiques du bassin du Congo (Cesbc)

Centre d'études stratégiques du bassin du Congo = ISSN  2493-5387

CesbcPresses : Indicateur éditeur : 979-10-90372


 

Lassane NTSIBA-MADZOU

Enseignant-Chercheur à la Faculté des Lettres, Arts et Sciences Humaines.

Université Marien NGOUABI, République du Congo

E. mail : lassanentsibamadzou @ gmail.com

 

Représentations liées aux activités de santé préventive

par les populations autochtones du Département de la Likouala

_____________

Résumé

 Cet article rend compte d’une recherche sur les représentations liées aux activités de santé préventive des populations autochtones. Il présente et analyse les données quantitatives et qualitatives recueillies, à travers le questionnaire et les entretiens semi-directifs, auprès d’un échantillon composé d’autochtones et de bantous (groupe témoin) dans le département de la Likouala.

Les résultats montrent que dans l’ensemble, les autochtones et les bantous connaissent l’utilité de la vaccination et ont recours aux services de vaccination. Cependant les données sur la vaccination des enfants, dont les parents ont déclaré n’avoir pas été   vaccinés, montrent qu’il y a un phénomène de résistance à la vaccination.  L’analyse des données recueillies permet de montrer que les comportements des parents d’enfants non vaccinés sont déterminés, non seulement par les sentiments éprouvés, des attitudes et représentations traduisant leur vécu  par rapport au vaccin et à la vaccination mais aussi par des éléments du contexte social, économique et culturel. Le phénomène de résistance à la vaccination observé est lié à un ensemble de facteurs psychologiques, sociaux, économiques et culturels.

Mots clés : Représentations sociales, Croyances, Attitude, Santé préventive, Autochtone, Bantou

***

Abstract

This article reports on research about representations related to preventive health activities of indigenous peoples. It presents and analyzes the quantitative and qualitative data collected, through the questionnaire and the semi-structured interviews, with a sample of indigenous and bantu (control population) in the department of Likouala (Congo).

The results show that, on the whole, indigenous and bantu people know the usefulness of vaccination and use vaccination services. However, immunization data for children, whose parents say that their children are unvaccinated, show that there is resistance to vaccination. This analysis of the data collected shows that various factors (psychological, social, economic and cultural) determine this resistance.

Keywords: Social representation, Believe, Attitude, Preventive health, Indigenous, Bantu

*

 *****

*

 

INTRODUCTION

 

L’examen de la situation de peuples autochtones de la République du Congo révèle que les taux de mortalité des enfants autochtones sont cinq fois plus élevés que ceux des bantous. Les femmes autochtones ne bénéficient pas des mêmes soins que les femmes bantoues à l’accouchement. En effet, elles accoucheraient dans leurs campements, sans assistance d’agents qualifiés des services de santé (ADHUC) (1)

Par ailleurs, les peuples(2) autochtones font l’objet d’exclusion, de marginalisation et de stéréotypes négatifs et sont confrontés à des problèmes majeurs liés aux droits de l’homme, notamment : l’analphabétisme élevé, la non protection juridique de leurs terres ancestrales, l’impact négatif de l’exploitation forestière, la pratique de la servitude, les violences et abus sexuels, l’inaccessibilité aux soins de santé primaire, la non jouissance du droit de citoyenneté.

Parmi les initiatives prises par le Gouvernement avec l’appui des partenaires , afin de favoriser leur intégration, une loi(3) adoptée en 2011 vise à protéger les droits fondamentaux des populations autochtones, à préserver leur culture et à leur garantir un statut de citoyen à part entière.

Malgré des tentatives d’intégration, les autochtones constituent un groupe de population particulièrement vulnérable. En effet, l’enquête sur les connaissances, attitudes et pratiques des populations autochtones, en matière de prévention du VIH/SIDA et leur accès aux services sociaux de base, révèle le faible recours des populations autochtones aux soins et services de santé en général (UNICEF, 2007). Outre le fait que ces populations n’ont pas accès aux services de santé, leur mobilité et l’éloignement les rend inaccessibles aux campagnes de santé publique. Les stratégies spécifiques de vaccination mises en œuvre pour les atteindre n’ont pas toujours atteint les objectifs escomptés. Ainsi parmi les communautés autochtones pauvres et marginalisées, particulièrement attachées à leurs us et coutumes, les couvertures vaccinales restent très basses. Dans les rapports qui rendent compte de la couverture vaccinale dans le département de la Likouala, on relève des taux d’abandon élevés parmi les populations autochtones. Ainsi les taux d’abandon, la mortalité infantile élevés et l’émergence ou la persistance des maladies évitables par la vaccination attestent que de nombreux autochtones résistent à se faire vacciner.

De tels constats laissent-ils entrevoir un phénomène de résistance à la vaccination par les communautés autochtones ?

La présente étude s’articule autour du questionnement suivant : quels sont les raisons et facteurs qui déterminent la résistance des populations autochtones à la vaccination ?

L’objectif général de l’étude est d’identifier les raisons et les facteurs qui déterminent la résistance des populations autochtones à la vaccination.

L’hypothèse principale de l’étude postule que la résistance des populations autochtones à la vaccination serait liée à l’influence de divers facteurs.

Cette recherche s’appuie sur les données quantitatives et qualitatives recueillies, à travers le questionnaire et les entretiens semi-directifs, auprès des autochtones et des bantous (groupe témoin).

Cet article est structuré en trois parties. La première partie propose les définitions des concepts clés de la recherche. La deuxième partie aborde les aspects méthodologiques. La troisième parie présente et analyse les données de l’enquête.

1. Définitions des concepts clés

1.1. Les représentations sociales

Conceptualisées par différentes disciplines des sciences sociales et humaines, elles se réfèrent à des phénomènes qui traduisent des significations, tels les systèmes de référence qui permettent d’interpréter les événements de la vie courante et de réagir aux différentes situations rencontrées, les catégories qui servent à classer les circonstances, les phénomènes et les individus.

De nombreux auteurs s’accordent pour définir la représentation comme « une forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social » (D., Jodelet, 2003).

La complexité inhérente aux représentations vient de l’articulation du travail psychique de la représentation  et du travail social et culturel de codification du groupe. Subordonné à la fois, aux déterminants sociaux, institutionnels et aux exigences des aspirations personnelles, le phénomène réalise donc l’articulation du psychologique et du social.

Le concept de représentation permet de mieux comprendre les individus et les groupes en analysant la façon dont ils se représentent eux-mêmes, les autres et le monde. Dans la dynamique des représentations sociales et individuelles se réalise le lien entre le sujet et sa culture appréhendée comme un système de représentations appris et transmis par l’éducation, l’imitation et le conditionnement dans un environnement social donné.

Ainsi définie, une représentation se présente comme un ensemble de connaissances, de croyances et d’attitudes propres à un groupe donné et qui déterminent les comportements et les pratiques dudit groupe.

1.2. L’attitude

Le concept d’attitude semble avoir fait l’objet de nombreuses définitions de la part de plusieurs auteurs. Selon J. Stœtzel (1978) et P. Lazarsfeld (1971) par exemple, il désigne une préparation spécifique à l’action impliquant une relation sujet-objet. Ils précisent cependant que la notion d’attitude correspond à une variable inférée, ni directement observée, ni observable.

Mais progressivement, le sens du concept va évoluer pour désigner la manière dont une personne se situe par rapport à des objets, des situations, des valeurs… Pour G. De Montmollin (1980), l’attitude est une disposition interne de l’individu vis-à-vis d’un objet social.

Le pôle affectif renvoie notamment à l’aspect motivationnel de la conduite puisqu’il est toujours une question de relation entre un sujet qui désire et un objet qui attire ou éveille l’intérêt latent (J. Nuttin, 1980). C’est dans ce sens que l’aspect directionnel du comportement est évoqué par l’auteur. Dans le même sens, S. Newcomb (1965) définit l’attitude d’un individu envers un objet donné comme une disposition du sujet à être motivé à propos de cet objet. La relation sujet-objet apparait au cœur du problème et celle que les autochtones et les bantous entretiennent avec l’objet vaccin par le biais de la vaccination nous intéresse. En définitive, l’attitude est une disposition mentale susceptible d’infléchir et d’orienter les réactions d’un sujet dans une direction privilégiée.

1.3. Les croyances

La croyance est une façon de penser qui permet d’affirmer, sans esprit de critique, des vérités ou l’existence des choses sans avoir à en fournir la preuve, et donc sans qu’il soit possible de prouver qu’elles sont fausses. La croyance en tant que attitude mentale ou disposition psychologique réside dans un mode spécifique de consentement au vrai, en ce sens que croire c’est toujours, pour l’individu, donner son adhésion, accorder sa confiance à une proposition ou à un énoncé qui revêt pour lui une valeur de vérité. L’absence de preuves constitue un critère de différenciation capital permettant de distinguer la croyance d’autres attitudes mentales. Pierre Bourdieu (1980) lie la notion de croyance à celle de l’habitus qu’on peut définir comme une disposition durable à agir, qui s’avère capable de générer une infinité de pratiques. Les croyances sont donc cause de comportements. Elles sont présentes dans toute pratique humaine et elles ont un lien direct avec toutes nos actions.

1.4. Vaccin et vaccination

Le vaccin est une substance pathogène qui inoculée confère l’immunité d’individu contre une maladie. Autrement dit, c’est un produit que l’on injecte à une personne pour le protéger d’une maladie déterminée. Par extension c’est toute substance inoculée à un individu pour l’immuniser contre la maladie qui a produit cette substance (vaccin préventif) ou pour lutter contre une maladie (vaccin thérapeutique).

La vaccination, comme action sanitaire préventive, consiste à introduire chez un individu une préparation antigénique dérivée ou proche d’un agent infectieux déterminé de manière à créer une réponse immunitaire capable de le protéger contre la survenue d’une maladie liée à cet agent infectieux. La pratique de la vaccination dans une collectivité ou une population permet le contrôle sinon l’élimination de certaines infections contagieuses.

2. Méthodologie de la recherche

2.1. Approche de l’étude

La nature des questions et les objectifs de la recherche portant sur les représentations liées aux activités de santé préventive des populations autochtones amènent à combiner deux approches de recherche : l’approche quantitative et l’approche qualitative. Par ailleurs le groupe constitué de bantous permet de comparer les données montrant l’ampleur des représentations entre les deux populations voisines (autochtones et bantoues).

L’approche quantitative est axée sur les statistiques de fréquentation des services de vaccination, notamment des enfants et adultes dans les localités où se sont déroulées les enquêtes.

L’approche qualitative a concerné les données relatives aux opinions sur le vaccin, la vaccination, ses effets et les prestataires des services de vaccination.

2.2. Champ d’investigation

2.2.1. Populations cibles des enquêtes

Les cibles principales des enquêtes sont les autochtones et les bantous, hommes et femmes en âge de procréer résidant dans le département de la Likouala qui a la plus grande concentration des populations autochtones.

2.2.2. Localités

Les enquêtes ont été menées dans les localités (quartiers et villages) situées dans les districts d’Impfondo et de Dongou.

2.3. Échantillon et échantillonnage

L’échantillon constitué n’est pas soumis au critère de représentativité d’ordre statistique. En effet, seules les personnes ayant volontairement accepté de répondre au questionnaire font partie de l’échantillon. L’échantillon visé est de 1336 sujets dont 50% (668) d’autochtones et 50% (668) de bantous. Il est suffisamment diversifié sur la base de certains critères : sexe, statut matrimonial.

Chaque variable indépendante (sexe, statut matrimonial et identité) a été manipulée selon deux modalités. Nous avons ainsi obtenu 8 groupes de 137 sujets chacun (cf. figure 1, résumant les caractéristiques de l’échantillon).

Figure 1

Échantillon des sujets ayant participé à la recherche

Source : Enquêtes de l’auteur, 2018

 

2.4. Technique de collecte des données

La collecte de données a été faite par le biais d’un questionnaire qui comporte une série de questions fermées et ouvertes visant à recueillir à l’information sur : le sexe, le statut matrimonial, le nombre de naissance et le nombre d’enfants en vie, le vaccin (connaissance et utilité), le recours à la vaccination et les représentations, opinions, attitudes, croyances des enquêtés par rapport au vaccin et ses effets, par rapport aux prestataires des services de vaccination.

2.5. Traitement des données

Les données recueillies par questionnaire ont fait l’objet d’un traitement informatique en ayant recours au logiciel Epi-data.

Quant aux données qualitatives, elles ont été exploitées et traitées par la technique d’analyse de contenu qui donne lieu à un travail d’interprétation et de saisie des sens. Il s’agit des réponses aux questions exprimant des représentations, opinions, attitudes et croyances.

3. Présentation et analyse des données de l’enquête

La présentation et l’analyse des données de l’enquête se fera en deux temps : d’abord l’analyse des données quantitatives et, en suite, celle des données qualitatives issues de l’analyse de contenu.

 

3.1. Analyse des données quantitatives

3.1.1. Connaissance sur la vaccination

Tableau 1

Connaissance de ce qu’est le vaccin

 

Identité du répondant

Bantous

Autochtones

Total

Connaissance ou pas de ce qu’est le vaccin

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Connaissent

637

95,35

615

92,06

1252

93,73

Ne connaissent pas

21

3,14

39

5,83

60

4,49

ND

10

1,49

14

2,09

24

1,79

Total

668

100

668

100

1336

100

Source : Enquêtes de l’auteur, 2018

Les bantous et les autochtones, en majorité, déclarent connaitre ce qu’est le vaccin. La comparaison des données des deux groupes de population montre que la proportion des bantous, soit 95,35 %, qui déclare connaitre le vaccin est légèrement supérieure à celle des autochtones qui représente 92,06 %.

Tableau 2

Connaissance du rôle et de l’utilité du vaccin

 

 

Identité du répondant

Bantous

Autochtones

Total

À quoi sert le vaccin ?

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Connaissent

628

94,01

611

91,46

1239

92,7

Ne connaissent pas

4

0,59

14

2,09

16

1,19

ND

36

5,38

43

6,43

79

5,91

Total

668

100,00

668

100,00

1336

100,00

Source : Enquêtes de l’auteur, 2018

La majorité des bantous et des autochtones déclare connaitre à quoi sert le vaccin. Cependant, la comparaison des données des deux groupes de population montre que la proportion des bantous (94,01 %) qui déclare connaitre le rôle et l’utilité du vaccin est supérieure à celle des autochtones (91,46 %).

Tableau 3

Raisons de vacciner la population selon l’identité du répondant

 

Identité du répondant

Bantous

Autochtones

Total

Pourquoi les services de santé vaccinent-ils ?

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Prévenir les épidémies

606

90,71

527

78,89

1133

84,80

Nous sauvent des maladies

17

2,54  

45

6,73

62

5,47

ND

45

6,73

96

14,52

141

10,55

Total

668

100

668

100

1336

100

Source : Enquêtes de l’auteur, 2018

Les bantous et les autochtones, en majorité, déclarent connaitre les raisons pour les lesquelles les services de santé vaccinent la population, c’est-à-dire la prévention contre les maladies. Il ressort de la comparaison des données des deux groupes de population que la proportion de bantous, soit 90,71 %, qui déclare connaitre pourquoi les services de santé vaccinent les populations est supérieure à celle des populations autochtones qui représente 78,89 %.

Tableau 4

Sexe et connaissance

 

Sexe du répondant

Savez-vous pourquoi les services de santé vaccinent-ils ?

Oui

Non

ND

Total

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Masculin

295

26,39

19

54,29

72

39,34

386

28,89

Féminin

823

73,61

16

45,71

111

60,66

959

71,11

Total

1118

100,00

35

100,00

183

100,00

1336

100,00

Source : Enquêtes de l’auteur, 2018

La proportion des enquêtées femmes qui connaissent le rôle de la vaccination est supérieure (73,61 %) à celle des enquêtés hommes (26,39 %). Dans toutes les sociétés, le fait d’être une femme, assurant un rôle essentiel d’entretien des enfants, prédispose à être plus ouvert aux services susceptibles de garantir la bonne santé, le bien-être et la survie des enfants. En outre, pendant la grossesse et après l’accouchement, les femmes soumises à des contrôles périodiques constituent la cible privilégiée des campagnes de sensibilisation et d’éducation pour la santé. Ce qui favorise l’acquisition des connaissances sur la vaccination qui déterminent la réceptivité envers l’offre des services de santé.

Le sexe en soi ne détermine pas la connaissance du rôle de la vaccination, mais c’est à travers le rôle que la femme est appelée à jouer dans la famille à l’égard des enfants que cette caractéristique est déterminante. Ainsi la variable sexe semble avoir une incidence sur la connaissance du rôle et de l’utilité de la vaccination.

Tableau 5

Statut matrimonial et connaissance

 

Statut matrimonial

Savez-vous pourquoi les services de santé vaccinent-ils ?

Oui

Non

ND

Total

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Marié et Concubinage

662

59,21

11

31,43

74

40,44

747

55,91

Célibataire

347

31,04

20

57,14

78

42,62

445

33,31

ND

109

9,75

4

11,43

31

19,94

144

10,78

Total

118

100,00

35

100,00

183

100,00

1336

100,00

Sources : Enquêtes de l’auteur, 2018

 

Les personnes mariées ou vivant en « concubinage » (59,21 %) semblent, plus que les célibataires (31,04), mieux connaitre le rôle de la vaccination. On peut supposer que le fait d’être partenaire dans un couple, qui a déjà procréé, tend à favoriser l’attention envers l’information qui détermine la connaissance des services de santé et la vaccination.

Le statut matrimonial semble donc avoir une incidence sur la connaissance du rôle de la vaccination.

Dans l’ensemble, les bantous et les autochtones, en majorité, déclarent connaitre ce qu’est est le vaccin, à quoi il sert et la raison pour laquelle les services de santé vaccinent la population, c’est-à-dire prévenir les épidémies.

Les comparaisons des données des deux groupes de population dévoilent que les proportions de bantous qui déclarent connaitre ce qu’est le vaccin, son rôle et son utilité et la raison pour laquelle les services de santé vaccinent la population sont supérieures à celles des autochtones.

La proportion des enquêtées femmes qui déclarent connaître le rôle de la vaccination est supérieure à celle des hommes. Les personnes mariées ou vivant en concubinage semblent plus que les célibataires mieux connaître le rôle de la vaccination.

Cet ensemble de connaissances que possèdent les bantous et les autochtones sur le vaccin et le rôle de la vaccination, produit de leurs expériences et des informations recueillies de leur milieu social, va les amener à recourir à la vaccination.  

3.1.2. Recours à la vaccination

Dans l’ensemble, parmi les deux groupes de populations, la majorité des enquêtés adultes déclare avoir été vaccinée. Toutefois, la proportion des bantous, soit 87,72 % qui déclarent avoir été vaccinée, est supérieure à celle des enquêtés autochtones qui représente 73,50 %. Néanmoins, 24,85 % des enquêtés autochtones n’ont pas été vaccinés contre 11,82 %.

Tableau 6

Recours à la vaccination selon l’identité du répondant

Avez-vous été vacciné ?

Identité du répondant

Bantous

Autochtones

Ensemble

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Oui

586

87,72

491

73,50

1077

80,61

Non

79

11,82

166

24,85

245

18,33

ND

3

0,45

11

1,65

14

1,05

Total

668

100,00

668

100,00

1336

100,00

Sources : Enquêtes de l’auteur, 2018

Tableau 7

Recours à la vaccination selon le sexe du répondant

Avez-vous été vacciné ?

Sexe du répondant

Masculin

Féminin

Total

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Oui

461

69,01

595

89,07

1056

79,04

Non

199

29,79

65

9,73

264

19,76

ND

8

1,19

8

1,19

16

1,20

Total

668

100,00

668

100,00

1336

100,00

Sources : Enquêtes de l’auteur, 2018

Les femmes ont plus tendance à recourir à la vaccination (89,07%) que les hommes (69,01%). Le fait qu’elles soient exposées à des risques liés à la grossesse et à l’accouchement amène les services de santé à les intégrer dans un dispositif de suivi où interviennent les services de vaccination. Ce n’est pas le sexe en soi qui favorise le recours aux services de vaccination, mais c’est à travers le rôle de la femme dans le processus de la procréation que la variable sexe est déterminant.

Tableau 8

Recours à la vaccination et statut matrimonial

 

Statut matrimonial

 

Vos enfants sont-ils vaccinés

Oui

Non

ND

Total

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Marié et Concubinage

646

62,05

53

20,62

20

52,64

719

53,82

Célibataire

304

29,20

143

55,64

15

39,47

462

34,58

ND

91

8,74

61

23,73

3

7,89

155

11,60

Total

1041

100,00

257

100,00

38

100,00

1336

100,00

Sources : Enquêtes de l’auteur, 2018

Les enquêtés mariés ou vivant en « concubinage », soit 62,05 %, qui déclarent que leurs enfants sont vaccinés représentent une proportion plus élevée que ceux qui se déclarent « célibataires » dont 29,20 % ont déclaré que leurs enfants ne sont pas vaccinés. Les personnes vivant en couple, donc impliqués dans le processus de procréation, peuvent effectivement trouver un intérêt pour la vaccination qui assure la protection de leur progéniture. Le statut matrimonial semble avoir une incidence sur le recours aux services de vaccination pour les adultes et les enfants.


Tableau 9

Enfants vaccinés selon l’identité des parents

Enfants vaccinés ?

Identité du répondant

Bantous

Autochtones

Ensemble

Effectif

%

Effectif

%

Effectif

%

Oui

600

89,82

528

79,04

1128

84,43

Non

63

9,43

124

18,56

187

14

ND

5

0,75

16

2,39

21

1,57

Total

668

100,00

668

100,00

1336

100,00

Sources : Enquêtes de l’auteur, 2018

Parmi les enquêtés, les proportions de parents qui déclarent que leurs enfants sont vaccinés sont majoritaires dans les deux groupes de population. Cependant, la proportion des enquêtés bantous, 89,82 %, qui déclare que leurs enfants sont vaccinés est supérieure à celle des autochtones qui représente 79,04 %. Néanmoins parmi les enquêtés qui déclarent que leurs enfants ne sont pas vaccinés, la proportion des autochtones est supérieure à celle des bantous : soit 18,56 % contre 9,43 %.

Dans l’ensemble parmi les deux groupes de population, la majorité des enquêtés adultes déclarent avoir été vaccinés. Cependant la proportion des enquêtés bantous, soit 91,80 %, qui déclarent avoir été vaccinés est supérieure à celle des enquêtés autochtones qui représentent 72,62 %. Néanmoins, 24,85% des enquêtés autochtones n’ont pas été vaccinés contre 11,82 % des enquêtés bantous.

Ces données de l’étude permettent de soutenir l’hypothèse de l’existence d’un phénomène de résistance à la vaccination parmi la population en général, mais qui a un caractère plus prononcé chez les populations autochtones.

Pour quelles raisons les enquêtés autochtones et bantous ne vaccinent-ils pas leurs enfants ? Et quels sont les facteurs qui déterminent ce phénomène de résistance à la vaccination observé ?

3.2. Analyse des données qualitatives

Les données qualitatives recueillies par les entretiens semi-directifs ont fait l’objet d’une analyse de continu portant sur les raisons évoquées par les parents des enfants non vaccinés, les raisons de la préférence du lieu de vaccination.

3.2.1. Raisons évoquées par les parents des enfants non vaccinés

L’analyse de contenu des données recueillies lors des entretiens permet de cerner certaines raisons évoquées par les parents bantous et autochtones, expliquant pourquoi leurs enfants ne sont pas vaccinés. Il se dégage  de l’analyse de contenu des discours recueillis que les comportements des parents sont déterminés par des sentiments éprouvés, des attitudes et représentations traduisant leur vécu par rapport au vaccin et à la  vaccination. En outre, l’analyse d’autres raisons évoquées par les parents des enfants non vaccinés met en évidence des éléments du contexte social et économique dans lequel vivent les populations concernées.

3.2.1.1. Des sentiments éprouvés : la crainte et la peur

La crainte et la peur suscitées par la vaccination, ressenties par les autochtones et les bantous, se révèlent dans les extraits des propos, tels que :

« J’ai peur qu’ils souffrent des maladies que les Blancs inventent » (Bantous)

« Je crains que mon enfant tombe chaque fois malade » (Bantous)

« Peur que le vaccin ait des effets négatifs sur eux » (Autochtone)

« De peur que je perde le seul enfant qui me reste » (Autochtone)

« Les vaccins nous font peur par rapport à la contre propagande » (Autochtone)

Les sentiments de crainte et de peur que traduisent ces propos sont fondés sur des appréhensions concernant le risques de maladies, les effets secondaires des vaccins et les préjugés envers les « blancs ».

3.2.1.2. Des attitudes contre le vaccin jugé contre nature

Les enquêtés expriment des prises de position qui traduisent des attitudes d’opposition au vaccin et à la vaccination fondées sur la croyance en la force protectrice de la nature :

« La nature protège, le vaccin est vulnérable » (Autochtone)

« Les vaccins n’assurent pas la sécurité de nos enfants » (Autochtone)

« Nos grands-parents ont survécu, ils n’ont jamais eu de vaccin » (Bantou)

Les attitudes que révèlent ces propos s’expriment comme une disposition mentale qui détermine les réactions d’opposition aux activités de vaccination.

3.2.1.3. Des représentations

L’analyse de contenu des discours des enquêtés, exprimant l’opposition à la vaccination révèle que le vaccin est objet de représentations. En effet, selon les discours recueillis, il est représenté comme une menace et un danger pour le corps sain, vecteur de maladies, objet mortifère, objet pour les riches, produit assimilé aux urines et mal adorant.

a. Le vaccin représenté comme une menace pour le corps

Le vaccin produit des effets secondaires qui sont perçus comme une menace pour le corps.

« Affaiblissement de l’organisme des enfants » (Autochtone)

« Le vaccin affaiblit les enfants » (Bantou)

« Les enfants souffrent des effets négatifs » (Autochtone)

« Diminution du sang, diarrhée » (Autochtone)

« Diminution du sang et fortes fièvres » (Autochtone)

« Donne la maladie, vomissement, fatigue » (Bantou)

« Faiblesse sexuelle » (Bantou)

b. Le vaccin représenté comme un danger pour l’organisme

« Dangereux pour la santé » (Bantou)

« Les vaccins sont dangereux » (Bantou) 

« Des mauvais produits sont à l’intérieur du vaccin » (Autochtone)

« Parce que ça diminue le sang et donne la diarrhée à des enfants » (Autochtone)

c. Le vaccin représenté comme vecteur de maladies

« Le vaccin ajoute les maladies » (Bantou)

« Le vaccin donne encore plus des maladies » (Autochtone)

« Le vaccin donne des maladies aux enfants » (Autochtone)

« Parce que l’enfant fera la fièvre » (Bantou)

« Donne encore des maladies aux enfants » (Bantou)

d. Le vaccin représenté comme objet mortifère, porte malheur

« Parce qu’il y a trop des morts à cause du vaccin » (Autochtone)

« Après la vaccination, j’ai perdu un de mes enfants » (Autochtone)

« Les enfants meurent beaucoup » (Bantou)

« Les enfants meurent à cause des vaccins » (Autochtone)

« Le premier enfant à avoir été vacciné était mort. Je n’en veux plus » (Autochtone)

e. Le vaccin représenté comme un objet pour les riches

« Parce que le vaccin, c’est pour les riches » (Autochtone)

f. Le vaccin représenté comme produit associé aux urines

« Parce que les produits sont faits avec les urines » (Autochtone)

g. Le vaccin représenté comme un produit associé à la mauvaise odeur

« Parce que le vaccin sent mauvais et rend malade » (Bantou)

Les propos ci-dessus, émanant des enquêtés autochtones et bantous, reflètent des représentations du corps affaibli, du corps affecté par les maladies, du sang vital en diminution, donc en manque, de la virilité sexuelle compromise, du vaccin produit nocif, associé aux urines et à la mauvaise odeur, du corps anéanti par la mort.

De telles représentations qui véhiculent des perceptions négatives sont une composante des structures mentales qui conditionnent le rapport au vaccin et à la vaccination.

3.2.1.4. Autres raisons liées au contexte social économique

L’analyse de contenu des discours, comportant les raisons pour lesquelles les enfants ne sont pas vaccinés, révèle certains éléments se rapportant au contexte social et économique, tels que l’influence du conjoint, le manque d’argent, l’indisponibilité du fait des activités de survie (chasse et cueillette), l’absence au jour de la vaccination ou l’oubli du calendrier vaccinal.

a. Influence/interdiction du conjoint

« Parce que mon mari me l’avait interdit » Autochtone)

« De nombreuses maladies, mon mari ne veut pas qu’on les vaccine » (Bantou)

b. Manque d’argent

« Pas d’argent » (Bantou)

c. Indisponibilité liée aux activités de chasse et de cueillette

« Parce que les enfants sont souvent en déplacement » (Autochtone)

« Quand il y a une vaccination, nous sommes en forêt pour la pêche » (Autochtone

d. Absence au jour de la vaccination ou oubli du calendrier vaccinal

« Je n’étais pas là le jour de la vaccination » (Autochtone)

« Chaque fois qu’il y a une campagne de vaccination, nous sommes en forêt » (Autochtone)

« J’avais oublié le jour de la vaccination »(Bantou)

« Je m’étais trompé de date »(Bantou)

Dans la société congolaise, encore marquée par les traditions culturelles, les relations entre les sexes sont dominées par le rôle prépondérant du masculin par rapport au féminin. La décision de vacciner les enfants ne peut pas être prise par la femme seule. Elle doit être soumise à l’agrément du conjoint dans le couple. La pauvreté et la précarité caractérisent la vie des populations des zones rurales en manque de ressources financières ne leur permettant pas de répondre aux dépenses de santé. La satisfaction des besoins vitaux, nécessitant l’investissement dans les activités agricoles, la chasse et la cueillette, rend souvent indisponibles les populations déployées en forêt dans des zones inaccessibles aux services de vaccination. Dans ce contexte, les absences et l’oubli du calendrier de vaccination sont un phénomène récurrent.

3.2.1.5. Raisons de la préférence de lieu de vaccination

L’analyse de contenu des discours exprimant la préférence du lieu de vaccination permet d’identifier différentes raisons explicatives justifiant le choix pour le village : l’éloignement, le coût de transport, la peur que les enfants éprouvent dans un CSI, la rapidité et la facilité du service, la longue attente et rejet/stigmatisation.

a. Distance éloignée entre le village et le centre de vaccination

« À cause de la distance » (Autochtone)

« À cause de l’éloignement » (Bantou)

b. Coût de transport

« À cause des déplacements qui coûtent chers » (Autochtone)

« À cause du manque de moyens de déplacement » (Autochtone)

« Accès facile, ne paye pas déplacement » (Autochtone)

« Au moins au village, nous évitons de nous déplacer » (Autochtone)

« Déplacement trop cher » (Autochtone)

c. La peur éprouvée par les enfants au Centre Social Intégré (CSI)

« Au CSI les enfants ont souvent peur » (Bantou)

d. Rapidité et facilité du service

« À domicile, c’est rapide par rapport à l’hôpital » (Bantou)

« Accès facile aux vaccins, agents se déplacent » (Autochtone)

« Accès facile pour les enfants » (Bantou)

« Au village, c’est rapide, au centre trop lent » (Autochtone)

« Au village, je ne paye pas le déplacement » (Autochtone)

« Dans le village, on vaccine devant chaque maison » (Bantou)

e. Longue attente

« À l’hôpital on attend des tours et on attend longtemps » (Bantou)

« Au CSI, on attend longtemps pour être reçu » (Autochtone).

f. Rejet/stigmatisation

« À l’hôpital les infirmiers nous disent qu’on sent mauvais » (Autochtone)

« À l’hôpital, on ne respecte pas l’ordre d’arrivée » (Autochtones).

3.3. Les facteurs de résistance à la vaccination

L’analyse des raisons évoquées par les parents des enfants non vaccinés a permis d’identifier un ensemble de facteurs psychologiques, sociaux, économiques, culturels qui déterminent la résistance à la vaccination.

3.3.1. Facteurs Psychologiques

Les facteurs psychologiques déterminants de la résistance à la vaccination : la crainte et la peur suscitées par le vaccin et ses effets secondaires, des représentations associées au vaccin perçu comme un objet dangereux, vecteur de maladies et mortifère, des attitudes d’opposition à la vaccination considérée comme contre nature.

3.3.2. Facteurs Sociaux

Dans les relations sociales, l’influence du conjoint interdisant la vaccination des enfants apparait comme un facteur déterminant.

3.3.3. Facteurs économiques

La pauvreté monétaire qui caractérise les populations rurales en manque de ressources financières est aussi un facteur déterminant.

3.3.4. Facteurs culturels

L’attachement à des pratiques traditionnelles de protection contre les maladies, ainsi que les croyances qui y sont associées.

3.3.5. Autres facteurs

Les autres facteurs déterminants de la résistance à la vaccination sont : la longue attente, la stigmatisation envers les autochtones dans les centres de vaccination et l’éloignement des centres de vaccination sont bien connus et compris.

Conclusion

Les analyses effectuées montrent que parmi la population enquêtée, le rôle et l’utilité de la vaccination sont bien connus et compris. Les bantous semblent mieux le connaître que les autochtones. Les variables sexe et le statut matrimonial ont une incidence sur la connaissance et la compréhension du rôle et de l’utilité de la vaccination.

Les autochtones et les bantous adultes en général ont recours à la vaccination. Le recours à la vaccination déclaré par une proportion de 91,80 % des bantous est plus élevé que celle des autochtones qui représentent 72,62 %.

Dans l’ensemble, autochtones et bantous ont recours à la vaccination des enfants. La proportion des sujets qui ont recours à la vaccination des enfants est plus élevée chez les bantous (89,82 %) que chez les autochtones (79,04 %). Le sexe en soi ne favorise pas le recours à la vaccination, mais c’est à travers le rôle assigné au sexe féminin dans la procréation qui détermine son comportement. Le statut matrimonial semble avoir une incidence sur le recours à la vaccination des adultes et des enfants.

Les données de l’étude permettent de soutenir l’hypothèse de l’existence d’un phénomène de résistance à la vaccination parmi la population en général, mais qui a un caractère plus prononcé parmi la population autochtone. Selon les données de recours à la vaccination, 24,85% des enquêtés autochtones n’ont été vaccinés, contre 11,82 % des enquêtés bantous. Par ailleurs, parmi les déclarants d’enfants non vaccinés 18, 56 % d’autochtones contre 9,43% de bantous. Les comportements de ces déclarants sont déterminés non seulement par les sentiments éprouvés, des attitudes et représentations associées au vaccin et à la vaccination, mais aussi par les influences du contexte social, économique et culturel. Le phénomène de résistance à la vaccination observé parmi les populations autochtones et bantoues est lié à un ensemble de facteurs psychologiques, sociaux, économiques et culturels.


 

Références bibliographiques

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STOETZEL, Jean, (1978),

La psychologie sociale, Paris, Flammarion.


 

(1) Centre de Ressources des Droits de l’Homme et de la Démocratie de l’Association pour les Droits de l’Homme et de l’Univers Carcéral.

(2) Commission Africaine des Droits des Peuples(2005) et Enquête sur les connaissances, attitudes et pratiques des peuples autochtones en matière du VIH : sida et de leur accès aux services sociaux de base (MASAHF-UNICEF-CNLS, 2007).

(3) loi n° 5-2011 du 25 février 2011 portant promotion et protection des populations autochtones.

 

 

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